La Ville à trois vitesses et autres essais

Loin de la vision déformée et sensationnaliste que les médias véhiculent généralement sur « les banlieues », cet ouvrage s’attache à saisir au plus près la transformation actuelle de la question sociale en France. Dans ce recueil de ses meilleures contributions à la revue Esprit dans les années 2000, Jacques Donzelot observe comment ces mutations remettent en cause les successives politiques urbaines, sociales et sécuritaires mises en place par l’État Providence. Son analyse fait apparaître, d’un côté, un processus de dégradation de la condition salariale qui s’accroît à mesure que l’on va du centre de la société ou de la ville vers la périphérie, des centres historiques vers les « Cités », des emplois les plus qualifiés vers ceux qui le sont le moins, voire pas du tout. D’un autre côté, on assiste simultanément au mouvement inverse de ceux qui veulent quitter cette périphérie et éviter toute promiscuité avec ses habitants. Par l’effet couplé de ces mouvements contraires se dessine un changement non seulement de forme mais de nature de la question sociale. En effet le repli identitaire des populations installe au cœur de la société une logique de séparation où l’évitement remplace la confrontation. Se développe ainsi un urbanisme affinitaire qui modifie complètement les termes traditionnels de la cité et installe pernicieusement une ville – comme une société – à plusieurs vitesses.